Guinée : Nouvelle taxe sur les transactions électroniques dans le code général des impôts
Fiscalité et douane

Cette année en République de Guinée, le droit fiscal s’est encore plus étoffé. Le conseil de la transition a institué à travers la loi de finance de 2023, une nouvelle taxe sur les transactions électroniques.
L’article 12 de ladite loi, complétant l’article 410 quarter du code général des impôts, dispose :
- Il est appliqué une taxe de 5% sur les revenus générés par les services digitaux opérés par les plateformes de commerce électroniques étrangères ou locales
1. Vers une volonté de se conformer aux législations des autres Etats de la sous-région
Cette réforme fiscale s’inscrit dans le même esprit que celles des Etats voisins, à savoir restaurer la stabilité macroéconomique. En effet, au Ghana la même taxe a été intégrée dans certaines opérations financières en mars 2022. En Côte d’Ivoire, c’est la loi n°23-2020 du 13 mai 2020 portant loi de finances rectificative pour l’année 2020 qui a institué cette taxe sur les transactions électroniques. Toutefois contrairement à la règlementation de ces Etats, la réforme ne précise ni la portée de la nouvelle taxe, encore moins ses modalités d’application.
2. Une taxe justifiée par l’essor des transactions électroniques en Afrique
Ces dernières années, le commerce électronique a connu un grand essor en Afrique, et est notamment au cœur d’échanges multilatéraux tels que le commerce interentreprises, le commerce entre entreprises et consommateurs, les biens et les services… La croissance des commerces en ligne a également généré des moyens de paiement plus directs, intensifiant les transactions électroniques. Ces dernières ont alors adopté différentes formes afin de répondre aux nouveaux besoins des consommateurs.
Les traditionnelles transactions bancaires ont laissé place à la bancarisation des établissements de réseaux téléphoniques. Le « Mobile money » est aujourd’hui un moyen de paiement bien ancré dans les habitudes de la population grâce à l’incontestable performance des téléphones portables. Il a fortement contribué à l’émergence d’un commerce dit en ligne via les réseaux sociaux, les influenceurs sociaux et autres plateformes.
L’apparition de facilitateur de commerce électronique, des entreprises spécialisées, intensifie la croissance des commerces en ligne poussant les commerçants traditionnels à se familiariser au commerce en ligne. Selon le Globe News Wire, le marché mondial du commerce social connaitrait possiblement une croissance annuelle moyenne de 31,4% entre 2020 et 2027. Aussi les applications de transfert d’argent instantané à l’international, sans passer par les banques, affluent de jour en jour. Sans compter le phénomène des cartes prépayées, présent dans certains Etats africains, et qui est également institué par des structures non bancaires.
3. La potentielle portée fiscale de la nouvelle taxe
Tout compte fait, cela soulève des questions sur la portée fiscale de cette nouvelle taxe, étant donnée l’ampleur des transactions électroniques en Guinée.
Force est de constater que l’imposition à la TVA et aux taxes sur les ventes de l’e-commerce s’avère insuffisante pour régulariser la fiscalité applicable aux acteurs de commerce électroniques et qui jusqu’à présent, leur confère un avantage sur les acteurs traditionnels. La nouvelle taxe électronique serait par conséquent un moyen de rétablir l’équilibre fiscal entre les différentes formes de commerce, mais aussi de régulariser la situation fiscale des acteurs du secteur informel.
L’autre point important émerge dans les conséquences de l’application de la taxe. Les récents outils de transaction électronique sont plus que jamais en adéquation avec les besoins des populations africaines, et la réalité du système économique africain. Etendre ainsi la nouvelle taxe aux transactions effectuées par les consommateurs pourrait sensiblement impacter le panier de la ménagère. D’autant plus que le taux de 5% fixé par l’Etat Guinéen reste supérieure, à celui des autres Etats de la sous-région. En effet, la Côte d’Ivoire présente un taux à 1%. Quant au cas Ghanéen, il est marqué par une évolution du taux : initialement fixé à 1,5%, il a fait l’objet d’une baisse à 1% à la suite de la réception pessimiste des consommateurs.
L’application de la taxe aux établissements risquerait par conséquent d’accroitre le prix des services, causé par sa refacturation au consommateur. Une solution qui aura sans doute d’autres répercussions.