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Le formalisme des cautions, avals et garanties consenties au profit des tiers par sociétés anonymes

Affaires, propriété intélectuelle, sociétés, etc.

Conformément à l’article 1 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, les cautions avals et garanties sont des moyens accordés au créancier par la loi ou la convention signée entre les parties pour garantir l’exécution des obligations.

 

Ces garanties appartiennent à la catégorie juridique des suretés personnelles en ce sens qu’elles consistent en l’engagement d’une personne (physique ou morale) de répondre de l’obligation du débiteur principal en cas de défaillance de celui-ci ou à première demande du bénéficiaire de la garantie.

 

Dans un souci de protection vis-à-vis des engagements importants que peuvent représenter les cautions, avals et garanties consenties par les dirigeants sociaux au profit des tiers, le législateur OHADA a subordonné leur validité à l’observation d’un certain nombre de modalités. En effet, l’octroi d’une caution, d’un aval ou d’une garantie est subordonné à l’autorisation préalable du Conseil d’Administration (1), laquelle doit être limitée dans son montant et dans sa durée(2) sous peine de nullité ou d’inopposabilité à la société (3).

 

1. Autorisation préalable du Conseil d’Administration

 

Cette autorisation est requise pour les engagements pris par des tiers et non ceux de la société elle-même. Il en découle qu’aucune autorisation n’est requise en cas de garantie des engagements propres à la société, tels que ceux d’une de ses succursales qui n’est qu’un démembrement de la société à qui elle appartient.

 

Au plan pratique, conformément à l’article 449 de l’Acte Uniforme OHADA sur le Droit des sociétés commerciales, pour qu’une société accorde valablement une caution, un aval ou une garantie, le Conseil d’Administration (réuni dans les conditions de quorum et de majorité) doit obligatoirement donner son autorisation préalable et formelle. Il ne s’agit donc ni d’un accord, ni d’une ratification, mais d’une autorisation.

 

La jurisprudence Française estime que l’appartenance à un groupe de sociétés ne dispense pas les dirigeants d’une filiale appartenant à ce groupe de solliciter l’autorisation de son Conseil d’Administration, même si la société mère a donné son accord à l’octroi de la garantie par la filiale.

 

Soulignons qu’il existe un mécanisme de délégation, posé à l’alinéa 2 de l’article 449 de l’Acte Uniforme suscité par lequel le Conseil d’Administration peut habiliter son Président ou le Directeur Général à consentir un tel acte. Néanmoins, ce mécanisme nécessite toujours en amont une décision du Conseil d’Administration.

 

Le principe de l’autorisation du Conseil d’Administration permet à cet organe de prendre connaissance de la convention de prêt conclu par le tiers et d’exprimer un consentement exprès sur l’engagement de la société à travers une prise de décision formelle.

 

La forme des décisions du Conseil d’administration est encadrée par les articles 458 et suivants de l’acte uniforme sur le Droit des sociétés commerciales lesquels exigent notamment que lesdites décisions soient constatées par des procès-verbaux. Il est dès lors nécessaire que cette autorisation revête la forme d’un procès-verbal à l’instar de toutes les délibérations du Conseil d’Administration.

 

2. Limitation du montant et de la durée de l’autorisation

 

L’autorisation préalable du Conseil d’Administration doit être assortie d’un montant total que l’engagement de la société au profit du tiers ne doit pas excéder. Ce principe souffre cependant d’une exception lorsqu’il s’agit de donner à l’égard des administrations fiscales et douanières, des cautions, avals, garanties à première demande, au nom de la société. En effet, dans cette hypothèse, la garantie n’est pas limitée dans son montant.

 

L’autorisation requise est à consentir dans la limite particulière d’un plafond pour chaque engagement ou dans le cadre d’un montant global que ne doit excéder le cumul des garanties souscrites.

 

Au cas où il y aurait un dépassement du montant autorisé par engagement ou de l’ensemble cumulé, l’autorisation du Conseil d’Administration devra être requise.

 

En ce qui concerne la durée de ou des autorisations, celle-ci ne peut être supérieure à un an quelque soit la durée des engagements cautionnés, avalisés ou garantis. Cette durée est la même pour ce qui concerne les garanties souscrites par la société au profit administrations fiscales et douanières.

 

A priori, les termes de l’alinéa 3 de l’article 449 qui limite la durée des engagements à un an peuvent conduire à penser que l’autorisation ne peut être donnée pour des garanties appelées à se prolonger au-delà d’un an.

 

Mais on voit mal un créancier se contentant d’une garantie limitée à un an lorsque la durée de l’engagement est d’une durée supérieure à un an. Il faut donc admettre, sous peine de retirer pratiquement aux sociétés toute possibilité de consentir des sûretés, que le texte signifie seulement qu’au bout d’un an, de nouvelles garanties ne peuvent être accordées qu’en vertu d’une nouvelle autorisation et qu’il n’est pas nécessaire de confirmer ou de renouveler les garanties dont l’engagement principal est en cours d’exécution.

 

Il conviendrait lorsque la durée de l’engagement principal excède celle de la garantie, que le procès-verbal des délibérations du Conseil d’Administration prévoie les conditions de renouvellement ou de prorogation de la garantie consentie.

 

La prudence exige par ailleurs que l’acte de cautionnement d’aval ou de garantie fasse référence à l’autorisation donnée par le Conseil d’Administration, laquelle devra être annexée audit acte. Cette exigence a notamment pour avantage de faciliter le contrôle de l’existence de l’autorisation ainsi que sa portée.

 

Aussi, en cas de délégation de pouvoirs donnée par le Conseil d’administration à un dirigeant social pour conclure l’acte de garantie, le créancier devra s’assurer que le délégataire dispose d’une habilitation valable et qu’il agit dans le cadre de celle-ci.

 

Soulignons qu’il conviendrait également de vérifier l’état des sûretés de la société souscriptrice inscrites au Registre de Commerce, à l’effet d’apprécier son niveau d’endettement et sa capacité à honorer l’engagement pris.

 

3. Défaut d’autorisation ou de limitation du montant et de la durée de la garantie

 

On peut se demander si l’autorisation est requise lorsque ces garanties sont données par une Société anonyme qui en fait son activité professionnelle, notamment les établissements financiers, bancaires et de microfinance.

 

Au sens de l’avis n° 02/2000/EP, 26 avril 2000 en date du 26 avril 2000 rendu par la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, les dispositions de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales sont d’ordre public et s’appliquent à toutes les sociétés commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur objet. Il s’ensuit que les dispositions de l’article 449 comme d’ailleurs celles de l’article 506, sont impératives et par conséquent, la sanction de l’inobservation du formalisme des cautions avals et garanties est la nullité.

 

Il reste maintenant à savoir s’il s’agit d’une nullité absolue ou relative. Pour la doctrine juridique OHADA, la nullité absolue paraît excessive et est de nature à compromettre un secteur d’activité vital pour l’économie. Aussi, il est judicieux d’admettre une nullité relative laquelle a l’avantage d’ouvrir la possibilité de confirmer ou de ratifier les garanties données sans autorisation préalable.

 

En pratique, l’on observe que certaines banques ont opté pour une autorisation globale qui tient également compte des ratios prudentiels. A ce titre, le niveau de fonds propres doit être pris en compte. Pour les engagements excédant cette limite, les dirigeants requièrent l’autorisation du Conseil.

 

Pour la doctrine juridique Française, la sanction du défaut d’autorisation est l’inopposabilité de l’acte à la société, ce qui constitue donc une sanction pour le tiers bénéficiaire de la garantie et non pour la société ou ses dirigeants qui n’auront pas respecté l’obligation d’autorisation préalable.

 

Toutefois, la responsabilité de ces dirigeants est susceptible d’être engagée tant à l’égard de la société que du tiers.

 

Confronté à cette règle, le bénéficiaire de la garantie doit s’assurer que l’autorisation a été formellement donnée et vérifier que le montant de la limite fixée par le Conseil d’administration est respecté car il lui sera notamment impossible d’invoquer l’existence d’un mandat apparent ou une ratification ultérieure.

 

Lorsque la garantie accordée n’est pas conforme à l’autorisation donnée par le Conseil, l’acte sera également inopposable à la société.

En revanche, si les cautions, avals ou garanties ont été donnés pour un montant total supérieur à la limite globale fixée pour la période en cours, le dépassement ne peut pas être opposé aux tiers qui n’en n’ont pas eu connaissance, à moins que le montant de l’engagement invoqué n’excède à lui seul l’une des limites (globale ou particulière) fixées par la décision du Conseil d’Administration.

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